Les sénateurs réagissent aux propos tenus par la première dame en Espagne
Conférence de presse des sénateurs
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Au cours d’une conférence de presse organisée, aujourd’hui au sénat, les sénateurs initiateurs du projet de mise en place d’une enquête concernant les fonds accumulés par la fondation KB, ont réagi en réponse aux propos tenus, il y a de cela plus de trois jours en Espagne par l’épouse du Président de la République.
Les sénateurs ont qualifié la déclaration de Mme Khattou Mint Elboukhari de « propos orduriers à la fois outrageants, injurieux et diffamatoires », soulignant, en même temps, que ces propos tenus en présence de son époux, le Président de la République constituent «des faits graves et un cumul d’infractions pénales distinctes».
Nous publions, ci-joint, le texte intégral de la déclaration que les sénateurs ont rendu publique en marge de leur conférence de presse :
Déclaration
Le mardi 22 juillet 2008, la Dame Khatou mint El Boukhary a délibérément choisi le sol étranger (Espagne) pour proférer publiquement à l’endroit des Sénateurs de la République en présence de son époux, Son Excellence Monsieur le Président de la République des propos orduriers à la fois outrageants, injurieux et diffamatoires.
En effet, au cours de l’entretien accordé par le Président de la République aux représentants de la colonie mauritanienne à Madrid et en présence de la presse nationale et internationale la Dame Khatou mint El Boukhary a, sans gêne et en violation de toutes les règles élémentaires de politesse et de courtoisie humaine, qualifié certains sénateurs mauritaniens « de menteurs », « d’usurpateurs », et « d’imposteurs ».
Ces faits graves forment un cumul d’infractions pénales distinctes :
- Le délit d’outrage envers les dépositaires de l’autorité publique, fait prévu et puni par l’article 204 et suivants du Code Pénal ;
- Le délit de calomnie, de diffamation et d’injure, faits prévus et punis par les articles 348 et 349 du Code Pénal.
Mais en application de la lettre de l’esprit de l’article 5 du Code Pénal qui dispose « qu’en cas de confusion de plusieurs crimes ou délits, la peine la plus forte est seule prononcée » et par souci de concision nous retenons comme infraction principale le délit d’outrage envers les dépositaires de l’autorité publique.
L’article 204 du Code Pénal dispose : « lorsqu’un ou plusieurs magistrats de l’ordre administratif ou judiciaire, lorsqu’un ou plusieurs jurés auront reçu dans l’exercice de leurs fonctions ou à l’occasion de cet exercice quelque outrage par paroles, par écrit ou dessin non rendus publics, tendant, dans ces divers cas, à inculper leur honneur ou leur délicatesse, celui qui leur aura adressé cet outrage sera puni d’un emprisonnement de quinze jours à deux ans. »
La substance de cet article décline clairement les éléments constitutifs de cette infraction pénale qui sont au nombre de cinq :
1. Il faut en premier lieu que l’outrage soit adressé à l’une des personnes que la loi protège. Ces personnes sont d’une manière générale les divers citoyens exerçant une fonction publique ou remplissant un service public.
Aujourd’hui, le droit positif et la jurisprudence sont unanimes pour considérer que le mandat parlementaire est une fonction publique dont les membres des Assemblées sont investis par l’élection et dont le contenu est déterminé par la Constitution.
« Chargés de vouloir pour la Nation », les représentants du peuple obéissent à un régime juridique fortement protecteur de leur honneur et de leur délicatesse. Immunités parlementaires apparaissent dans ce cas comme des protections pour garantir l’indépendance du parlementaire et éviter toutes les formes d’entrave qui pourraient être apportées au libre exercice de son mandat.
Ces protections, fonctionnelles et personnelles, sont instituées, no dans l’intérêt du parlementaire mais dans celui du mandat, ce qui leur confère un caractère objectif. Il s’agit donc de mesures (immunités) d’ordre public pour mettre le pouvoir législatif au-dessus des atteintes.
La notion de magistrat de l’ordre administratif, au sens de l’article 204 du Code Pénal, est englobante et la jurisprudence, nationale et internationale, est constante pour y faire inclure : le Président de la République, les Ministres, les Parlementaires, les Secrétaires d’Etat, les Conseillers à la Cour des Comptes, les Walis, les Hakem, les Conseillers des Tribunaux administratifs et les membres des Commission municipales des révisions des listes électorales.
2. Il faut en deuxième lieu un fait matériel d’outrage. constitue un outrage, au sens de l’article 204 du Code Pénal, en réalité tout ce qui par l’un des modes déterminés par la loi, tend à déprimer et à mépriser la fonction. L’outrage par parole signifie toute expression blessante, touchant à l’honneur ou à la délicatesse de la personne visée et/ou de nature à diminuer le respect et la considération que les citoyens doivent avoir pour la fonction qu’elle exerce.
En qualifiant de « menteurs », « d’usurpateurs », et « d’imposteurs » les Sénateurs de la République, Khatou mint El Boukhary n’a-t-elle pas jeté le discrédit sur la souveraineté nationale qui, selon l’article 2 de la Constitution, appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants élus ? N’a-t-elle pas violé l’honneur et la conscience collective de tout un peuple ?
3. Le troisième élément constitutif de cette infraction tient au fait que l’outrage doit être adressé au dépositaire de l’autorité publique dans l’exercice de ses fonctions ou à l’occasion de cet exercice. En incriminant l’outrage, le droit pénal ne veut pas créer une sorte de privilège personnel mais de faire respecter l’autorité de la fonction.
La Dame Khatou mint El Boukhary a violenté l’honneur et la délicatesse des sénateurs de la République parce que l’exercice régulier et légitime de leurs prérogatives devait amener ceux-ci à déposer auprès de leur Chambre une procédure de constitution d’une commission d’enquête devant faire la lumière sur les modes de financement de la Fondation qu’elle dirige.
C’est donc bien, à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions que les sénateurs ont été pris à partie, vilipendés et outragés.
4. Le quatrième élément constitutif du délit d’outrage a trait au mode de publicité par lequel les propos blessants ont été portés à la connaissance du dépositaire de l’autorité publique. La jurisprudence est constante pour admettre que l’outrage est punissable, même si les paroles injurieuses ont été prononcées hors la présence du dépositaire de l’autorité publique.
Dans le cas d’espèce, Khatou mint El Boukhary a choisi dans un monde plus que médiatisé, le mode de conférence de presse, en présence de son époux, Président de la République, pour adresser ses invectives et blesser l’amour propre des sénateurs de la République.
5. Le cinquième élément constitutif du délit d’outrage n’est rien d’autre que l’intention coupable.
Le prévenu doit non seulement avoir connu la qualité du dépositaire de l’autorité publique mais encore avoir su que son acte tendait à amoindrir son autorité.
Par quels moyens, Khatou mint El Boukhary, au regard de son statut et des conditions matérielles de son forfait, peut-elle se défaire de son intention coupable ?
تاريخ الإضافة: 27-07-2008 16:10:55 |
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