Entretien avec Sidi Ould Ahmed Deya
M. Sidi Ould Ahmed Deya
|
«Il s’agit tout simplement d’engager un large débat entre tous les éléments ayant constitué cette force de changement et de se repositionner par rapport à la scène politique actuelle.»
Homme politique du Hodh El Gharbi qui s’est toujours situé au-dessus des groupes tribaux, Sidi Ould Ahmed Deya est surtout connu pour son indépendance d’esprit, son intégrité, sa rectitude. N’a-t-il pas, pour conserver cette réputation d’homme honnête et droit, quitté bien des postes convoités, lui qui fut ancien ministre des Finances, ancien contrôleur Financier de la RIM, Secrétaire général de l’OMVS, Wali et Secrétaire général du gouvernement ? Président du Conseil d’Administration de l’Office National du Tourisme depuis 2003, Sidi Ould Ahmed Deya avait, lors de la dernière présidentielle, soutenu le projet de la mouvance «La Force du Changement» laquelle avait soutenu la candidature de Zein Ould Zeidane. Avec la majeure partie des hommes et des femmes de cette mouvance et après avoir constaté la sous représentation de «La Force du Changement» au sein du parti ADIL, ainsi qu’au premier et nouveau gouvernement, ils ont décidé d’ouvrir un siège et d’engager un large débat avectoutes les composantes de cette mouvance pour se positionner sur la scène. Sans doute parce qu’ils lui font confiance pour son engagement et parce qu’il est, à leurs yeux, la personne la mieux indiquée pour édifier l’opinion publique sur les bouleversements de la scène. Nouakchott Info a rencontré Sidi Ould Ahmed Deya pour débattre de la Force du Changement, de son parcours depuis l’élection du Président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, de la gestion de son partenariat avec le Pouvoir par son ancien chef de file Zein Ould Zeidane et de son devenir, étant marginalisée par deux fois du gouvernement. Entretien.
Nouakchott Info : Qu’en est-il devenu de votre mouvance «La Force du Changement» qui avait soutenu Zein Ould Zeidane et de votre projet ?
Sidi Ould Ahmed Deya : Avant de répondre à vos question, j’aimerais préciser que je ne suis qu’un élément de cette mouvance et par conséquent, ce que je vous dirais n’engage que par propre personne. Il y a plus d’un an et à l’occasion des dernières élections présidentielles naissait un large courant, dénommé «La Force du Changement».
Essentiellement composé de jeunes (cadres, intellectuels, entrepreneurs, commerçants, diplômés chômeurs, fonctionnaires publics et privés) et soutenu par des personnalités politiques de tout bord, d’hommes d’affaires nationaux. Ce courant tenait à contribuer aux côtés d’autres forces semblables à sortir le pays des sentiers battus par le PPM, les SEM et par le PRDS sans toutefois verser dans l’extrémisme diviseur et par conséquent destructeur. Malgré la faiblesse de ces moyens matériels, la diversité de ses horizons, son inorganisation, les pressions de toutes sortes et subies de plus d’une part et malgré la courte période de son action (moins de deux mois), ce courant est venu en bout de piste la troisième force électorale du pays avec un score de près de 16%.
Par ce résultat plus qu’honorable et encourageant, cette formation devenait entre les deux tours le principal arbitre des deux challengers restants.
Pour des raisons stratégiques et essentiellement politiques, nous avons conseillé à notre candidat de rallier le candidat Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Les négociations ont abouti à l’obtention de notre candidat du poste de Premier Ministre. Mais nous avons été, comme tout le monde, surpris à l’annonce du premier gouvernement. Un gouvernement issu d’élection démocratique, formé en dehors de la majorité gagnante.
N.I. : Quelle évaluation faites-vous aujourd’hui de la gestion de ce partenariat par votre candidat, le Premier Ministre Zein Ould Zeidane ?
S.O.A.D. : A la veille de la constitution du gouvernement, nous avons été reçus par groupes par notre candidat, devenu Premier Ministre qui nous a signifié que l’idée de créer un parti politique n’était plus la sienne et qu’il fallait tout simplement s’organiser avec les autres soutiens du Président pour la plupart encore indépendants. Pour éviter la division et l’entrée en contradiction avec notre chef de file, nous avons accepté sans grande concertation. La manière dont la nouvelle formation politique a été construite nous a vus progressivement marginaliser. Je ne reviendrais pas sur les raisons du comment et du pourquoi. J’en citerais seulement l’absence de leadership et du manque de coordination.
N.I. : Pourquoi avoir persévéré dans l’idée de renoncer à créer un parti politique, sachant que vous avez personnellement été chargé par la mouvance La Force du Changement de plancher sur la question ?
S.O.A.D. : Je vous rappelle que ce courant est issu d’origines politiquement et socialement diverses et qu’il avait la caractéristique d’être spontané et n’a pas eu le temps de s’organiser ni avant ni en cours de la campagne présidentielle. Pour beaucoup d’entre nous, nous avions pensé qu’il était inutile de multiplier les formations politiques quand bien même l’objectif est de soutenir la réalisation d’un même programme. Si nous nous étions considérés suffisamment représentés au niveau de la nouvelle formation, ADIL, les contestations auraient été moins importantes alors que la revendication de la formation d’un gouvernement politique était commune à toutes les forces politiques ayant soutenu le Président Sidi. La formation du nouveau gouvernement a eu au moins le mérite de clarifier la scène politique. Nous en lisons à présent l’exclusion non seulement du Premier Ministre mais de l’ensemble de la mouvance l’ayant soutenu. Alors que par son positionnement, elle a été et demeure une composante de la Majorité présidentielle.
N.I. : Donc ce choix n’était pas judicieux ?
S.O.A.D. : Non. Aujourd’hui et avec le recul tels que les évènements se sont déroulés, nous considérons que nous avons redoublé parce que, malgré toute notre prédisposition et notre bonne volonté, il semble que l’on nous reproche de ne pas avoir voté au premier tour la candidature de Sidi Ould Cheikh Abdallahi.
N.I. : Revenons-en à cette bougeotte qui semble prendre aujourd’hui la mouvance «La Force du changement», les initiatives ayant soutenus Zein. Qu’y a-t-il au juste, pourquoi, tant de réunions, de campagnes de sensibilisations, qui est-ce qui vous fait courir ?
S.O.A.D. : Ce n’est pas nouveau, la classe politique ayant soutenu au deuxième tour le candidat Sidi et qui s’était constituée autour de son programme ne s’est pas trouvée représentée dans le premier gouvernement. Chaque formation ou groupe a exprimé à son niveau la déception et a revendiqué la formation d’un gouvernement politique. Le dernier gouvernement a contribué à clarifier la scène mais n’a pas constitué l’équilibre entre les différentes forces ayant soutenu le Président Sidi. C’est pourquoi beaucoup d’initiatives aujourd’hui bougent, non pas pour remettre en cause le soutien au Président et à son programme mais pour revendiquer une place convenable dans les structures politiques et gouvernementales leur permettant d’être des acteurs actifs dans la réalisation de ce programme.
N.I. : Certains observateurs estiment que la mouvance «La Force du Changement» est divisée en trois groupes : ceux qui, étant des fonctionnaires, ne peuvent être contre le Pouvoir ; les anciens fonctionnaires en attente d’être repêchés et des cadres et personnalités –et ils sont nombreux- qui estiment que le projet qui a été à l’origine de la création de la mouvance et de son candidat est plus important qu’attendre des nominations et donc qu’il faut franchir le Rubicon. Où vous situez-vous dans tout cela ?
S.O.A.D. : Je ne pense pas que la contradiction soit au niveau où vous situez et ce n’est pas mon point de vue. Il y a tout simplement qu’à l’occasion de la formation du dernier gouvernement, une pause de réflexion et de bilan nous semble nécessaire. Il s’agit tout simplement de revoir tout cela, d’engager un large débat entre tous les éléments ayant constitué cette force de changement et de se repositionner par rapport à la scène politique actuelle.
N.I. : Est-ce donc pour cette raison que vous avez décidé d’avoir un siège et peut-on considérer que c’est une manière de vous démarquer du parti ADIL dont nombre de membres du Conseil National sont de cette mouvance «La Force du changement» ?
S.O.A.D. : D’abord je précise qu’il ne s’agit pas d’un siège au sens d’un siège de parti ou de campagne. C’est tout simplement un lieu parmi tant d’autres où les éléments de cette sensibilité peuvent se rencontrer sans gêner les occupants d’un domicile. Par rapport au parti ADIL, il semble d’ailleurs que bon nombre des éléments de cette mouvance n’y avaient pas adhéré et la question aujourd’hui est d’engager ce débat sans préalable.
Propos recueillis par Mohamed Ould Khattatt
تاريخ الإضافة: 02-06-2008 13:20:57 |
القراءة رقم : 760 |